Dédié au légendaire DJ Robert Ouimet (1948-2022)
La guerre du Vietnam et les bouleversements sociaux... « The times they were (still) a’changin’ ».
La tension et le nombre de victimes de la guerre du Vietnam augmentent, tout comme l'angoisse et les protestations du public américain. Cela inclut le mouvement des droits civiques, qui atteint son point culminant avec l'assassinat de Martin Luther King Jr. le 4 avril, 1968.
Afin d'apaiser la colère suscitée par l'assassinat de King et d'éviter les émeutes, James Brown est engagé pour donner un concert télévisé au Boston Garden. Parmi son répertoire, il chante « I Got the Feelin' », la chanson-titre funky d'un album à peine sorti sur le marché.
« Some people say we got a lot of malice
Some say it’s a lotta of nerve
But I say we won’t quit moving
Until we get what we deserve »
— Say It Loud, I’m Black and I’m Proud, James Brown
« Say It Loud, I’m Black and I’m Proud », sorti en single en août 1968, et en album quelques mois plus tard, devient un hymne du mouvement Black Power, qui privilégie le style plus militant d'autodétermination des Noirs promulgué par Malcolm X, qu'à la stratégie d'intégration raciale non violente épousée par King.
À peu près au même moment, le comédien-chanteur Pigmeat Markham lance le tout premier morceau funky proto-rap avec « Here Comes the Judge ».
Le même mois, Marvin Gaye, de la Motown, remporte un succès énorme avec sa version soul psychédélique de la chanson de Gladys Knight & the Pips' « I Heard It Through the Grapevine », extrait de son album In the Groove.
Gaye avait déjà connu un certain succès en avril 1967, pour son duo avec la chanteuse Tammi Terrell sur « Ain’t No Mountain High Enough », repris plus tard par Diana Ross.
« Started my life
In a old, cold run down tenement slum
My father left, he never even married mom »
- Love Child, The Supremes
La chanson « Love Child », avec ses tendances soul psychédéliques, voit le jour en septembre 1968 et devient le troisième single le plus vendu de tous les temps par The Supremes. Avec sa formule radiophonique de « 3 minutes », Norman Whitfield avait prévu le coup. Véritable visionnaire, il senti que l'ambiance du pays était en train de changer et que la Motown devait changer de vitesse pour rester à la pointe de l'innovation musicale.
« It was hard times, needed somethin’ to ease my troubled mind
I left home seeking a job that I never did find
Depressed and down-hearted, I took to cloud nine
I, I, I, I, I, I’m ridin’ high on cloud nine”
- Cloud Nine, The Temptations
C'est ainsi que « Cloud Nine » atteint le sommet du classement des singles à l'automne 1968. Composée par Barrett Strong et le producteur Norman Whitfield, elle change la donne et devient un modèle pour The Temptations, et pour d'autres. « Cloud Nine » est la première chanson à utiliser à la fois la pédale wah-wah pour un effet psychédélique et deux batteurs qui jouent des parties distinctes. L'un d'eux s'occupe du motif rythmique du hi-hat en doubles croches, bientôt adopté par les séries policières et les films de blaxploitation des années 1970, tandis que l'autre se concentre sur le kick, la caisse claire et les toms. Ensemble, ils créent un groove syncopé à base de boucles qui allait s'avérer très influent. Il y comprend deux interludes de percussion, ou « breaks », dans le morceau, où dans le premier cas, seuls la batterie et le chant échangent leurs places, tandis que dans le second, la basse et les cordes sont ajoutées pour augmenter la tension. Les deux « breaks » aboutissent à un rythme 4/4 plus conventionnel qui relâche la pression. C'est aussi la première chanson des Temptations où l'on retrouve le chanteur Dennis Edwards à la place de David Ruffin. L'ambiance générale est définitivement plus sombre et plus droguée que les précédents efforts du groupe, ce qui conduit à une certaine réticence de la part de Berry Gordy à donner son approbation à cette nouvelle formule plus dure et progressive. La chanson permet finalement au groupe de remporter son premier Grammy, prouvant ainsi que Whitfield avait raison après tout.
En février 1969, l'album Cloud Nine voit le jour. Sur celui-ci, la chanson « Run Away Child, Running Wild », avec sa juxtaposition de piano et de guitare distordue dans son intro, combine des éléments de gospel et de rock psychédélique. Il s'agit non seulement de l'un des premiers morceaux sur le thème du ghetto, mais aussi, jusqu'alors, de la composition originale la plus progressiste des Temptations, de Motown et de soul music confondus. Empruntant une page à Sly and the Family Stone, les membres se partagent les voix principales, lesquelles couvrent une large gamme vocale. On y trouve également un jeu d'appel et réponse créatif entre les voix principales et les voix de soutien, dont la complexité rythmique est unique en son genre. Le tempo s'accélère vers le tiers du morceau avec un motif de hi-hat recyclé plus tard par Rhythm Heritage pour le morceau « Theme from S.W.A.T. » de 1975. Au milieu de la chanson, des tambourins viennent pimenter l'énergie. L'orgue et la guitare électrique floue suivent, faisant monter la tension.
Le morceau « I Gotta Find a Way (To Get You Back) » de l'album est un croisement entre le style Motown traditionnel et entraînant, avec la caisse claire qui entraîne le rythme 4/4, et le genre de morceau proto-disco que l'on trouve en 1972-73. Le groupe poursuivra dans cette voie avec « I Can't Get Next to You », qui figure sur l'album Puzzle People de 1969.
Enfin, ils clôturent la toute fin de la décennie avec le titre survolté « Psychedelic Shack ».
En novembre 1968, Sly and the Family Stone sortent le double-succès « Everyday People », avec le funky « Sing a Simple Song » sur la face B. Combinant le funk et la soul psychédélique, « Stand! » suivra, d'abord comme single, puis comme chanson-titre de leur quatrième album. Stand! contient également l'énergique « I Want to Take You Higher », qui fusionne le funk avec le rock à distorsion.
Pendant ce temps, le « Soul Brother No. 1 », alias James Brown, n'a jamais été du genre à « Give It Up or Turnit a Loose », qui est le nom du single qu'il sort en janvier 1969. Notez que le titre du single promo est légèrement différent de celui du single officiel « Give It Up and Turnit a Loose ».
Originaires de Cincinnati, dans l'Ohio, les Isley Brothers se font connaître pour la première fois en août 1959, avec le tube R&B « Shout! ». Près de dix ans plus tard, la formation s'aventure en territoire funky avec le single « It’s Your Thing », tiré de l'album It’s Our Thing.
À venir : The 5th Dimension, entre autres. Mais d'abord, nous allons faire une pause estivale dans cette série pour explorer d'autres facettes musicales. En attendant, « Let the Sunshine In ».
Pour en savoir plus sur Claude Lemaire, visitez...
https://soundevaluations.blogspot.ca/
Liste de référence (singles, albums et étiquettes) :
- “I Got the Feelin’” [King Records 45-6155]
- I Got the Feelin’ [King Records KS-1031]
- “Say It Loud – I’m Black and I’m Proud” [King Records 45-6187]
- Say It Loud – I’m Black and I’m Proud [King Records 5-1047]
- “Here Comes the Judge” [Chess 2049]
- Everybody Needs Love [Soul SS 706]
- “I Heard It Through the Grapevine” [Soul S-35039]
- In the Groove. [Tamla TS 285]
- “I Heard It Through the Grapevine” [Tamla T-54176]
- “Ain’t No Mountain High Enough” [Tamla T-54149]
- Unis [Tamla TS 277]
- Diana Ross [Motown MS711]
- “Love Child” [Motown M 1135]
- Love Child", [Motown MS 670]
- “Coud Nine” [Gordy G-7081]
- Cloud Nine [Gordy GS939]
- “Theme from S.W.A.T.” [ABC Records ABC-12135]
- Lever tôt [RCA Victor KJL1-0154]
- “I Can’t Get Next to You” [Gordy G-7093]
- Puzzle People [Gordy S-949]
- “Psychedelic Shack” [Gordy G 7096]
- Cabane psychédélique [Gordy GS947]
- “Everyday People”/”Sing a Simple Song” [Epic 5-10407]
- “Stand!”/”I Want to Take You Higher” [Epic 5-10450]
- Debout ! [Epic BN 26456]
- “Give It Up or Turnit a Loose” [King Records 45-6213]
- Criez ! [RCA Victor LPM 2156 ou LSP-2156].
- “It’s Your Thing” [T-Neck TN 901]
- It’s Our Thing [T-Neck TNS 3001]
- L'ère du Verseau [Soul CIty SCS-92005]
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