
Imaginez : nous sommes le 28 février 1970, à Copenhague. Led Zeppelin, les seigneurs incontestés du rock, s’apprêtent à monter sur scène... mais pas sous leur nom habituel. Ce soir-là, ils deviennent « The Nobs ». Une histoire digne d’une farce médiévale, avec une comtesse outrée, une menace de procès, et un changement de nom qui semble tout droit sorti d’une comédie absurde.
Entrée en scène d’Eva von Zeppelin : pas n’importe quelle noble en colère, mais une descendante directe du célèbre magnat des dirigeables. Armée de son indignation et d’un avertissement juridique, elle reprochait au groupe d’utiliser son illustre nom de famille avec audace, et s’insurgeait contre leur pochette d’album explosivement évocatrice de la catastrophe du Hindenburg.

Le premier acte de cette saga rocambolesque s’était déjà joué l’année précédente. Eva avait rencontré le groupe lors d’un événement qui, en théorie, devait apaiser les tensions. Dans un geste de conciliation, Page, Plant, Jones et Bonham avaient invité la comtesse à prendre le thé en coulisses. Leur espoir ? Lui montrer les visages humains derrière le mythe du Zeppelin et la convaincre de leurs bonnes intentions. Mais le plan a tourné court : la vue de l’image iconique de leur premier album, immortalisant le dirigeable Hindenburg en flammes, n’a fait qu’attiser la colère d’Eva.
Jimmy Page, en se remémorant cet épisode, ne peut s’empêcher de sourire devant l’absurdité de la situation. Ses récits mêlent amusement et incrédulité, comme s’il revivait un rêve étrange. Malgré leurs efforts, les négociations de paix ont échoué de manière spectaculaire. Et avec la menace d’un procès suspendue au-dessus de leurs têtes telle une épée de Damoclès, le groupe s’est retrouvé contraint de jouer sous un autre nom.
Alors que l’heure tourne et que le public de Copenhague attend avec impatience, Led Zeppelin fait ce qu’il sait faire de mieux : improviser, non pas avec ses instruments cette fois, mais avec son identité même. « The Nobs », un nom choisi avec un clin d’œil malicieux, fait office à la fois de solution astucieuse et de pied-de-nez subtil à l’absurdité de la situation. C’était un véritable coup de maître en matière de rébellion rock ‘n’ roll, transformant un désastre potentiel en un moment d’insolence pure et assumée.
Le concert, désormais gravé dans les annales de l’histoire du rock, n’était pas seulement une performance : c’était une déclaration, un témoignage de l’esprit indomptable du groupe et de sa capacité à flirter avec le chaos tout en gardant le sourire. Et John Bonham, éternel farceur, laissa libre cours à son imagination, rêvant à voix haute de pochettes d’albums délirantes qui auraient pu voir le jour sous ce nouveau nom.
En fin de compte, la soirée « The Nobs » à Copenhague ne fut pas une simple note de bas de page dans la carrière légendaire de Led Zeppelin : elle devint un symbole de leur résilience, de leur flair pour le théâtre et de leur engagement inébranlable envers le rock ‘n’ roll, même sous la pression de l’indignation noble. C’est une histoire qui fait autant partie de leur héritage que leurs hits en tête des charts, un rappel que parfois, les récits les plus mémorables sont ceux qui oscillent entre le sublime et le ridicule.

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