
PRÉAMBULE
Vous songez à vous lancer dans le vinyle, mais vous ne savez pas par où commencer ni quel pressage choisir ? Alors cette série est faite pour vous.
Se constituer une collection de disques à partir de rien peut être à la fois extrêmement plaisant et un brin intimidant. Cela peut aussi coûter plus cher qu’autrefois, car ce format autrefois considéré comme « mourant » a fait preuve d’une résilience remarquable depuis sa résurgence amorcée en 2007. Il existe tellement de disques formidables qu’il est tout simplement impossible de tous les couvrir, tous genres confondus. Pour cette série, je concentrerai donc mon attention sur la pop, le rock et la soul, en commençant par les années 1960.
Pour inclure le plus de titres possible, je ferai l’impasse sur mes habituelles analyses de chansons et de son, et me contenterai d’indiquer les informations essentielles sur le label et le genre musical, accompagnées d’un lien vers Wikipedia pour approfondir. Dans certains cas, je recommanderai aussi une réédition offrant une qualité sonore supérieure. La plupart de ces pressages devraient sonner à merveille, à condition de disposer d’un bon système audio. Si vous ne trouvez pas le pressage suggéré ou s’il dépasse votre budget, optez simplement pour une autre édition. Une simple visite sur la base de données de Discogs ou chez votre disquaire local vous montrera à quel point les prix peuvent varier, allant de quelques dollars à plusieurs milliers, même si la majorité des pressages coûtent moins de 200 $US, et la plupart sous la barre des 80 $US. Notez que le prix n’a que peu de rapport avec la qualité sonore ou la valeur musicale : il est généralement lié à la rareté, à l’état du disque et aux lois de l’offre et de la demande.
En ce qui concerne les disques d’occasion, il existe une convention d’évaluation bien établie — similaire à celle du monde de la bande dessinée — qui classe l’état du vinyle et de la pochette à l’aide d’abréviations, avec « M » (mint) et « NM » (near mint) en tête, représentant des exemplaires scellés ou « comme neufs ». Vient ensuite « VG+ » (Very Good Plus), qui indique une usure légère ou la présence de quelques « ticks » et craquements. Ce sont, dans une certaine mesure, des évaluations subjectives, mais qui méritent d’être prises en compte. Personnellement, j’ai tendance à éviter tout ce qui est classé « VG » ou en dessous.
On me demande souvent s’il vaut mieux opter pour un pressage original ou pour une réédition de qualité. Malheureusement, il n’y a pas de réponse toute faite. Les adeptes des originaux (ou « OGs ») soutiennent que les bandes maîtresses étaient fraîches et en parfait état à l’époque, ce qui permettait de capturer dans le vernis et les premiers pressages toutes les micro-informations qu’elles contenaient. Cela se défend, surtout quand on sait que certaines formulations de bandes se détériorent avec le temps. En revanche, autrefois, les ingénieurs de gravure filtraient souvent les basses les plus profondes afin d’éviter que les cellules bon marché ne sautent hors des sillons. Les bonnes rééditions contournent généralement ce problème, avec des graves plus profonds et des aigus plus étendus — parfois au point que ces derniers deviennent si détaillés qu’ils peuvent sembler analytiques. Parmi les meilleurs labels de réédition/remastering (par ordre alphabétique) figurent : Acoustic Sounds/Analogue Productions, Classic Records, Craft Recordings, DCC, Music Matters, Rhino, Tone Poet (Blue Note) et, bien sûr, celui qui a lancé le mouvement en 1978 : Mobile Fidelity Sound Labs (MoFi, MFSL).
Après près de 50 ans d’expérience avec le vinyle, je peux affirmer qu’il n’y a pas de règle absolue : c’est du cas par cas, plutôt qu’un consensus clair. Comme on dit, à chacun ses goûts.
Une dernière précision : en ce qui concerne l’analogique versus le numérique, à l’exception de quelques enregistrements classiques et jazz réalisés vers 1978-1979, tous les enregistrements originaux des années 1960 et 1970 ont été enregistrés, mixés, masterisés et gravés entièrement en analogique.
Bonne chasse !
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1960
Le rhythm & blues, le rock and roll et le rockabilly ont dominé la plus grande partie des années cinquante. Mais au tournant de la décennie, Little Richard avait choisi le ministère plutôt que la musique, et Elvis n’était plus le « King ». Appelé sous les drapeaux en mars 1958, son absence se faisait sentir dans les palmarès comme sur les écrans. En février 1959, un avion transportant Buddy Holly, Ritchie Valens et The Big Bopper s’écrasa, tuant tous ses occupants. Puis, en décembre, Chuck Berry fut arrêté en vertu du Mann Act, accusé d’avoir transporté une mineure au-delà des frontières de l’État.
Il n’est pas étonnant que ce genre immensément populaire ait encaissé un coup dur, laissant derrière lui un vide à combler. Elvis finit par rentrer aux États-Unis et retrouva les studios d’enregistrement de RCA en mars 1960, déclarant son grand retour avec Elvis Is Back!, sorti un mois plus tard. La plupart des chansons de ces premières années duraient entre deux et trois minutes et étaient d’une structure simple. Les 45 tours, plus que les albums, demeuraient la principale force créative — ces derniers étant souvent considérés par l’industrie comme de simples compilations de singles déjà parus et de morceaux de remplissage. Le mono était le format principal, tandis que la stéréo commençait à apparaître sur certaines parutions.
1 – Elvis – Elvis Is Back!. RCA Victor – LSP-2231 (1960, avr.), Analogue Productions – AAPP-2231 (2010), (2×45 rpm). Genre : rhythm and blues, blues, vocal, rock and roll.
Le surf rock instrumental est devenu très populaire en 1960 — d’abord aux États-Unis avec la reprise de « Walk, Don’t Run » de Johnny Smith par The Ventures, sortie en juin, puis au Royaume-Uni avec le succès de « Apache » des Shadows en juillet. Bien qu’ils ne soient pas officiellement considérés comme faisant partie de la British Invasion, les Shadows furent le premier groupe de rock britannique à enchaîner les succès dans les palmarès, avant que les Fab Four ne leur volent la vedette.
2 – The Ventures – Walk, Don’t Run. Dolton Records – BST 8003 (1960, déc.), 33 1/3 rpm. Genre : surf rock instrumental.
3 – The Shadows – Apache. Columbia – 45DB 4484 (R.-U.) (1960, juill.), 7 pouces, 45 rpm. Genre : surf rock instrumental.
1961
Bo Diddley a connu son premier succès en avril 1955 avec le titre « Bo Diddley », construit autour d’un rythme afro-cubain syncopé distinctif, devenu célèbre sous le nom de « Bo Diddley Beat ». Il a ensuite sorti plusieurs albums sur le label Chess et sa filiale Checker.
4- Bo Diddley - Bo Diddley Is a… Lover. Checker LP 2980 (mono) (1961, sept.), 33 1/3 tr/min. Genre : rhythm & blues, rock and roll, blues, 'Bo Diddley Beat'.
1962
Alors que la course à l’espace entre les États-Unis et la Russie s’intensifiait, le producteur, auteur-compositeur et ingénieur du son britannique Joe Meek a façonné ce méga-succès pour les Tornados, mêlant pop de l’ère spatiale et surf rock dans une fusion expérimentale aux accents exotiques.
5 – The Tornados – Telstar. Decca – 45-F 11494 (R.-U.) (1962, août), 7 pouces, 45 tr/min. Genre : pop de l’ère spatiale, exotica, expérimental, surf rock, rock and roll.
Fondé en 1957 sous le nom de Satellite Records — plus tard rebaptisé Stax (acronyme formé à partir des noms des fondateurs Jim Stewart et Estelle Axton) —, le label, ainsi que sa filiale sœur Volt, fut l’un des piliers majeurs du R&B et, plus encore, de la soul de Memphis et du Sud. C’est là que l’organiste Booker T. Jones et le quatuor interracial connu sous le nom de MG’s devinrent la colonne vertébrale et l’orchestre maison de facto du label.
Le quatuor interracial — une rareté dans le Sud ségrégationniste de l’époque — a joué un rôle essentiel dans le succès d’artistes soul des années 1960 tels que Wilson Pickett, Otis Redding et Sam & Dave. Ils ont également connu leur propre percée avec l’instrumental « Green Onions », sorti en single en juillet 1962, puis suivi en octobre de leur premier album du même nom.
6- Booker T. & The M.G.'s - Green Onions. Stax - 701 (mono) (1962, oct.), 33 1/3 tours. Genre : rhythm and blues, Memphis soul, rock instrumental.
Je recommande rarement les albums de compilation, car je privilégie généralement les albums et singles originaux pour leur qualité sonore et leurs versions intégrales. Mais il existe des exceptions, et la sélection suivante en fait partie. Le double LP 1962–1966 des Beatles, mieux connu sous le nom de Red Album, réunit 26 singles originaux du groupe le plus emblématique et influent de tous les temps. Bien qu’il soit paru en avril 1973, je l’ai inséré ici, car son morceau d’ouverture, « Love Me Do », a marqué un tournant historique dès sa sortie en single en octobre 1962. « Love Me Do » fut le premier d’une longue série de titres pop — ou beat/Merseybeat — qui allaient bientôt mener l’assaut de la British Invasion. Cette anthologie, organisée de manière chronologique, ne comporte aucune faiblesse, et la qualité sonore est, dans l’ensemble, supérieure à celle des versions originales : plus riche, mieux équilibrée, plus intime, et moins compressée. Un incontournable, s’il en est.
7- The Beatles - 1962-1966 alias the Red Album. Apple Records - PCSP 717 (UK), Apple Records - SKBO 3403 (CAN.) (1973, avr.), (2x 33 1/3 rpm). Genre : Merseybeat, beat music, pop music, rock.
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