_{Les prix indiqués sont en CA$ sauf indication contraire.}

PRÉAMBULE

Bienvenue dans ma série « trésors de la voûte à vinyle ». J'y présenterai des perles sélectionnées dans ma collection de vinyles d'environ 12 000 pièces, qui ne cesse de croître, accumulée sur une période de 45 ans et plus encore*. Il ne s'agit pas d'une liste typique des « plus grands de tous les temps », mais plutôt d'une visite guidée. J'ai choisi de vous présenter, en les accompagnant parfois d'une ou deux anecdotes, les singles et les albums de ma collection qui me sont les plus précieux, tant pour leur valeur historique que pour l'impact qu'ils ont eu sur mon parcours musical. Afin de couvrir le plus grand nombre d'entre eux, je n'entrerai pas dans le détail de l'histoire du disque ou de sa qualité sonore - pour ces aspects, je vous invite à visiter mon Top 500 SuperSonic List à l'adresse suivante https://soundevaluations.blogspot.ca/.

Les disques seront présentés dans l'ordre chronologique de leur date d'enregistrement ou de leur date de sortie originale, et non de leur date de réédition, ce qui signifie, par exemple, que l'iconique Kind of Blue de Miles Davis ne sera présenté qu'une seule fois, en 1959, malgré ses nombreuses remasterisations et rééditions au fil des ans. En outre, tous les pressages sont américains, sauf indication contraire. Si le terme « mono » n'est pas indiqué, considérez qu'il s'agit d'une version stéréo ou que la version stéréo est mon choix de facto entre les deux. Continuons, voulez-vous ?

37- Thelonious Monk – Brilliant Corners. Riverside Records – RLP 12-226 (1957, avril), Analogue Productions – AJAZ 12-226 (mono) (2003), (2×45 tours/min), 180g. Genre : jazz, hard bop.

Il faudrait être un ermite pour ne pas comprendre ce que Monk représente dans l'univers du jazz. On l'a qualifié d'indiscipliné, de dissonant, d'iconoclaste, d'icône, de maître, de mentor ; Monk était tout cela et bien plus encore. Aux côtés de Charlie Parker et Dizzy Gillespie, Monk faisait partie du trifecta musical à l'origine de la naissance du bebop. Brilliant Corners est, en effet, un album brillant dont la musique offre un aperçu introspectif du processus créatif d'un compositeur de génie. Enregistré par l'ingénieur Jack Higgins en octobre et décembre 1956, et sorti pour la première fois en mono sur le label Riverside en avril 1957, le pianiste partage la scène avec la crème de la crème de la scène jazz très active de l'époque — Sonny Rollins au saxophone ténor, Ernie Henry (moins connu) au saxophone alto, Clark Terry à la trompette, Oscar Pettiford et Paul Chambers à la contrebasse, et un Max Roach fascinant à la batterie. L'album contient cinq morceaux, dont la titanesque piste-titre qui ouvre l'album avec des intervalles anguleux et discordants et des cuivres stridents, tandis que sur « Pannonica », Monk délaisse le piano pour la délicate célesta. Je n'ai pas de pressage original, donc ma copie est celle de l'excellente production Analogue Productions en double 45 tours de 2003, réalisée par les ingénieurs de studio Steve Hoffman et Kevin Gray, qui se distingue par une présence instrumentale solide et des percussions percutantes. Une version stéréo [RLP 1174], que je n'ai pas entendue, est sortie un an plus tard.

38 - Charles Mingus – The Clown. Atlantic – 1260 (mono) (septembre 1957), Analogue Productions – APA 060-45, Atlantic 75 Audiophile Series, (mono) (juin 2024), (2×45 rpm), 180g. Genre : jazz, hard bop, influences avant-garde et free jazz.

Faisant partie de la « Audiophile Series » d'Analogue Productions, célébrant le 75e anniversaire d'Atlantic Records, The Clown de Charles Mingus n’a rien d’une plaisanterie, et ce, tant pour la qualité exceptionnelle de sa musique que pour le fait que, tel que Mingus l’a imaginé, le personnage du clown sur la pochette se suicide. Étant un grand fan de Mingus, je possédais déjà plusieurs de ses albums, mais, curieusement, pas celui-ci, pourtant si important. Je l’ai finalement reçu le week-end dernier. Composé de quatre longues pistes, dont la macabre chanson-titre est narrée par le conteur américain Jean Shepherd, le style musical oscille entre un bop incisif et une tension dissonante avant-gardiste omniprésente. Cet album suit ce qui est considéré comme le premier chef-d'œuvre de Mingus, Pithecanthropus Erectus de 1956. « Haitian Fight Song » ouvre l’album avec un solo de contrebasse imposant de Mingus. Enregistré en mono en février et mars 1957 aux Atlantic Studios de New York par les ingénieurs Larry Hiller et Tom Dowd, cette édition en double 45 tours par minute, superbement masterisée par Gray, est un véritable bijou sonore. La texture tonale de l’instrument de Mingus offre l’une des reproductions les plus réussies de contrebasse que j’ai pu entendre sur disque, avec juste ce qu’il faut de solidité, de clarté et de rondeur. Les saxophones, cymbales et percussions offrent une dynamique et un réalisme remarquables, avec seulement le trombone montrant des signes de légère distorsion due à la saturation du micro ou de la bande lors des crêtes musicales. Un incontournable pour les fans de Mingus !

39 - Sonny Rollins – Way Out West. Contemporary Records – C3530 (mono) (1957, ), Stereo Records – S7017 (1958), Analogue Productions – AJAZ 7530 (2003), (2×45 rpm), 180g. Genre : jazz, bop.

Parmi les audiophiles, Way Out West est probablement le titre le plus connu du catalogue Contemporary, en grande partie grâce au remaster de Doug Sax pour Analogue Productions, « APJ 008 », sorti il y a déjà longtemps en 1992. Depuis, de nombreuses rééditions par d'autres labels et ingénieurs ont vu le jour, à tous les prix, y compris autour de la barre des 400 $ fixée par The Electric Recording Company [ERC053S], qui n'en a sorti que 300 exemplaires, chacun atteignant désormais jusqu'à 800 $ sur le marché de l'occasion. Je dois avouer que la première fois que j'ai vu cette pochette dans un magazine ou un dépliant, avec ce type arborant un chapeau et un holster, j'ai supposé qu'il s'agissait d'un album de country et western. Même si j'étais déjà assez passionné de jazz, honteusement, je n'avais toujours pas découvert que Sonny Rollins était l'un des plus grands, sinon le plus grand saxophoniste ténor de tous les temps. Tiré de l’« Âge d’or » du jazz, l’album a été enregistré en stéréo et en mono par Roy DuNann, comme à son habitude, en mars 1957. Alors pourquoi, après toutes ces années, cet album est-il toujours autant prisé parmi les audiophiles ? Eh bien, comme je l’ai dit dans ma chronique précédente : « Contemporary et sa filiale Stereo Records ont sorti des albums de qualité sonore de référence, rivalisant avec tout ce qui a été produit depuis. De plus, la qualité artistique est à la hauteur des meilleurs. » Et parmi ce groupe d’albums prestigieux, Way Out West est sans doute celui au meilleur son de tous, et peut-être même le meilleur enregistrement de jazz, tout simplement ! Je sais que c’est une affirmation audacieuse et clivante, mais aussi pointilleux que je puisse être sur le son, j’ai beau essayer, je ne trouve aucun défaut à cet enregistrement. Tous les timbres sont parfaitement justes, et les musiciens apparaissent littéralement juste là, dans votre salon ! J’ai d’abord acheté cet excellent remaster de 1992, mais j’ai ensuite acquis l’édition double 45 tours par minute de 2003, réalisée par Gray et Hoffman [AJAZ 7530], qui offrait une chaleur et une présence accrues. Cet album, lui aussi, vendu à l'origine pour 50 $ US, est désormais épuisé et atteint plusieurs fois son prix initial sur Discogs. Pour ceux qui ne veulent pas débourser autant, Craft Recordings a réédité l'album en 2023 dans un coffret 3 LP [CR00434], gravé par Bernie Grundman, qui est également excellent, bien que, selon moi, il n'atteigne pas le niveau de la version 45 tours par minute de Gray-Hoffman.

40- The Poll Winners – The Poll Winners. Contemporary Records – C3535 (mono) (1957, juillet?), Stereo Records – S7010 (1958), Analogue Productions – AJAZ 7535 (2008?), (2×45 tours/min), 180g. Genre : West Coast jazz, bop.

Les albums des Poll Winners sont toujours de grands succès, tant sur le plan musical que sonore, et leur premier album éponyme—qui sera suivi de quatre autres LP—est probablement votre meilleure option si vous ne deviez en choisir qu’un seul de ce trio télépathique. Le guitariste Barney Kessel, le bassiste Ray Brown et le maître batteur Shelly Manne sont au sommet de leur art dans cet enregistrement de mars 1957 réalisé par Roy DuNann, qui nous a offert neuf morceaux captivants. Du premier accord à la coda finale, le groupe joue de manière parfaitement synchronisée, comme une escouade de Borgs sous expresso. Ne possédant pas de pressage original, mon premier choix en matière d’édition est l’exceptionnelle double 45 tours par minute d’Analogue Productions, réalisée par Gray et Hoffman. Un deuxième choix, presque aussi bon mais bien plus abordable dans ma collection, est l'Original Jazz Classic de 1984 [OJC-156] qui, en comparaison rapide avec l’édition d’Analogue Productions, ne sacrifie qu’une infime touche de chaleur.

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_{*Je m'en voudrais de ne pas mentionner que je partage certains de ces 12 000 disques avec un autre chasseur de vinyles, un co-conspirateur et un ami de toujours.}

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Liste de référence (singles, albums et étiquettes) :

Thelonious Monk - Brilliant Corners
Riverside Records - RLP 12-226 (1957, avr.), Analogue Productions - AJAZ 12-226 (mono) (2003), (2×45 tr/min), 180g. Genre : jazz, hard bop.

Charles Mingus - The Clown
Atlantic - 1260 (mono) (1957, sept.), Analogue Productions - APA 060-45, Atlantic 75 Audiophile series, (mono) (2024, juin), (2×45 rpm), 180g. Genre : jazz, hard bop, avant-garde et tendances free jazz.

Sonny Rollins - Way out West
Contemporary Records - C3530 (mono) (1957, juillet ?), Stereo Records - S7017 (1958), Analogue Productions - AJAZ 7530 (2003), (2×45 rpm), 180g. Genre : jazz, bop.

The Poll Winners – The Poll Winners
Contemporary Records - C3535 (mono) (1957, juillet ?), Stereo Records - S7010 (1958), Analogue Productions - AJAZ 7535 (2008 ?), (2×45 rpm), 180g. Genre : Jazz de la côte ouest, bop.