« À l’âge de 18 mois, un accident a affecté ma vue. » Ainsi commence la biographie de Pascal Ravach, du revendeur audio Mutine, sur le site web de l’entreprise. « Entre mes trois ans et 2021, j'ai subi plus d'une douzaine d'opérations aux yeux, et je dois souvent porter des lunettes noires. Les personnes aveugles que je rencontre me disent que j’écoute comme elles — de manière “intense”, “tactile”. C’est peut-être ce qui m’a prédisposé à étudier la musique, et plus tard à pousser mes recherches en Haute-Fidélité, à la recherche d’une reproduction holographique et réaliste… »

Belge d’origine et grand voyageur — il a rencontré sa femme vietnamienne en Thaïlande —, Pascal est un éternel étudiant de l’écriture, du spiritualisme, de l’ingénierie architecturale, de l’écologie et d’innombrables autres voies d’exploration personnelle. Il a entretenu toute sa vie une relation avec le matériel audio qui reflète ses idéaux d’équilibre et de naturel, des qualités qui définissent son approche zen du son.

Encouragé par un ami qui lui a suggéré que travailler dans l’audio pourrait être amusant, Pascal a débuté sa carrière comme consultant en Suisse en 1979. Cette décision l’a conduit, au fil des décennies, à représenter certains des produits audio les plus emblématiques et les plus novateurs sur le plan musical de l’histoire de la Hi-Fi.

Pascal, c’était un peu une réminiscence de mon passé. Après s’être fait un nom en Europe, il s’est installé à Montréal en 1996 et a fondé peu après l’entreprise Mutine. Parmi les marques qu’il distribuait figurait la société française Audiomat, dont le DAC Tempo 1, en particulier, faisait sensation de ce côté-ci de l’Atlantique. Ce Tempo 1 a été le catalyseur de notre rencontre, vers la fin des années 1990 ou au début des années 2000, après que j’ai manifesté mon intérêt pour l’écouter. Pascal a accepté de l’apporter chez moi pour que je puisse l’entendre sur mon propre système — une approche transactionnelle qui, à l’époque, était inédite au Québec, où les magasins ne prêtaient même pas de matériel. Ce geste de Pascal était non seulement plus amical que ce à quoi j’étais habitué, mais il était aussi tout à fait sensé : comme tout le monde le sait aujourd’hui, la meilleure façon de savoir comment un composant sonnera chez soi, c’est de l’écouter chez soi. Et cela a porté ses fruits : l’entreprise de Pascal a rapidement pris son envol en Amérique du Nord, au-delà même de ses attentes.

Avec le temps, il est devenu difficile de concilier sa passion pour l’audio et les exigences liées à la gestion d’une entreprise. En 2008, après 30 ans dans l’industrie, Pascal a souffert d’épuisement professionnel. Il a failli abandonner l'entreprise, mais l’encouragement de ses collègues — et surtout de ses clients — lui a donné la motivation de continuer, à un rythme toutefois plus modéré. Cette transition l’a mené vers une semi-retraite qui lui a permis de réaliser un rêve de longue date : concevoir et construire une maison bioénergétique, alimentée par l’énergie solaire, qui pourrait également servir d’espace pour accueillir les visiteurs désireux d’auditionner des équipements audio dans un environnement serein et méditatif.

À cette fin, trois salles d’écoute dédiées ont été aménagées, chacune soigneusement isolée de l’extérieur, réalisée en planches de pin noueux thermotraitées, et dotée d’un système audio complet, ainsi que de divers équipements et accessoires pouvant être remplacés lors d’une séance d’écoute.

Pascal est intransigeant sur ce qui fait un bon son : non mécanique, non forcé, réel — en un mot, naturel. Ce principe sous-tend la sélection des produits qu’il représente et définit ce qu’il appelle Audio Zendo : un espace où le matériel audio est jugé pour son rendu sonore, et non pour des spécifications impressionnantes sur le papier.

C’est pourquoi il préfère vendre des systèmes complets plutôt que des composants individuels qui poussent les utilisateurs à des mises à niveau sans fin. Selon lui, cette approche fragmentaire de la construction d’un système est une recette pour « Addition, Soustraction, Frustration ». À l’inverse, Pascal affirme que ses démonstrations sont soigneusement assemblées pour atteindre un niveau de musicalité qui rend toute mise à niveau inutile.

« Mon objectif est que mes clients achètent une fois pour toutes », a-t-il déclaré. « La plupart d’entre eux conservent le même système pendant des décennies. »

Tout se résume à ce que Pascal considère comme le facteur le plus important pour une reproduction sonore de qualité : la synergie. Et lorsque la synergie est au centre, peu importe que le système soit d’entrée de gamme ou haut de gamme. « Les gens confondent souvent le luxe avec la qualité du son », m’a-t-il confié.

Et ces trois salles d’écoute ? Vous pouvez passer de l’une à l’autre, jusqu’à atteindre la plus petite, dédiée à une installation surround KEF/Primare, visuellement discrète, d’un prix raisonnable, et qui, sur les images de concert diffusées pour nous, sonnait remarquablement bien : immersive, richement stratifiée, robuste, nuancée sur le plan dynamique et… eh bien, naturelle.

Les systèmes des deux autres pièces — l’une haut de gamme, l’autre plus abordable — étaient tous deux construits autour des enceintes à pavillon omnidirectionnel Duevel, que Pascal affectionne pour leur sonorité ample, leur image holographique et leur diffusion harmonique sans effort. Là encore, chaque système reflétait le critère central de Pascal pour un bon son : le naturel. Ils apportaient également une grande richesse de texture et de sensations tactiles.

Peut-être était-ce ma réceptivité accrue aux stimuli naturels qui m’entouraient, mais à chaque minute de musique qui s’écoulait, je sentais mon corps s’enfoncer un peu plus profondément dans le fauteuil d’écoute.

À la fin, je me sentais musicalement fortifié et spirituellement rééquilibré. Aujourd’hui encore, je garde le souvenir de cette expérience musicale exceptionnelle, vécue dans un lieu qui ressemblait moins à un magasin qu’à une véritable retraite musicale, créée pour honorer une autre forme d’équilibre : celle entre la musique et l’auditeur.

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