La conception des amplificateurs de classe A stagne, c'est ce qu'a affirmé Bruno Putzeys, pionnier de la classe D, lors de mes discussions avec lui ici et ici à propos de la classe D. Pour reprendre ses propos :
« Les amplificateurs de classe D continueront à s'améliorer progressivement, non pas parce qu'ils doivent rattraper la classe A (ce temps est révolu)... »
« Il n'est pas très difficile de construire un amplificateur de classe A respectable en utilisant uniquement quelques règles empiriques bien connues. Le résultat, c'est que, tandis que la classe D progresse régulièrement, la classe A a pratiquement stagné. »
« La question n'est plus de savoir si la classe D s'approche de la qualité de la classe A, mais combien d'amplificateurs de classe A peuvent réellement prétendre être à la hauteur des meilleurs amplificateurs de classe D. » Il ajoute : « Cela a provoqué un curieux renversement de paradigme. Qu'on ne s'y trompe pas, le fait fondamental demeure : un niveau de performance donné est beaucoup plus facile à atteindre en classe A qu'en classe D. Mais les concepteurs d'amplificateurs de classe A se sont, dans l'ensemble, reposés sur leurs lauriers. Je pourrais facilement concevoir un meilleur amplificateur de classe A, mais je ne vois personne attendre un meilleur moteur à essence. »
Et puis, il y a la question du prix : « Les modules de classe D haut de gamme actuels sont aujourd'hui si performants que, dans tout système sonore, quel que soit le prix, tout autre maillon de la chaîne est beaucoup plus faible, » a déclaré Bruno. « Même si les futurs modules s'améliorent, les avancées restent minimes comparées à l'impact, par exemple, d'un haut-parleur. C'est également valable pour des amplificateurs de classe A exceptionnels comme le Boulder 2150. Mais pourquoi s'en soucier, si un amplificateur de classe D, coûtant une fraction du prix et occupant moins d'espace, fait tout aussi bien ? »
Oui, un amplificateur de classe D est généralement moins coûteux à fabriquer ou à acheter que son équivalent en classe A ou A/B. Cependant, la quête audiophile a toujours été davantage orientée vers la recherche incessante d'une qualité sonore supérieure que vers des considérations économiques. L'amplification de classe A est, sans doute, la classe d'amplification la plus respectée, réputée pour sa pureté sonore sans distorsion. Cette qualité découle du fait que les transistors de sortie de cette topologie fonctionnent en permanence à pleine puissance, contrairement aux conceptions de classe A/B ou D, où les transistors s'activent et se désactivent à des niveaux de puissance plus modérés.
Mais l'affirmation de Bruno était-elle fondée ? La classe A avait-elle réellement atteint une période prolongée de stagnation, où les concepteurs semblaient surtout se reposer sur la technologie éprouvée, plutôt que d’introduire de nouvelles idées pour la faire évoluer et ainsi la maintenir pertinente ? Et cette complaisance apparente dans la conception de la classe A compromettait-elle la position de cette dernière parmi les classes d'amplificateurs, au point de paraître de plus en plus fragile face aux conceptions de classe D et classe AB ?
Bien sûr, en tant qu’acteur engagé dans le domaine de la classe D, Bruno pourrait être accusé de partialité dans ses remarques sur la classe A, mais il ne semble pas chercher à esquiver le débat. Ce qui est révélateur, c’est que ses critiques, lors de nos entretiens, visaient spécifiquement la classe A, et non la classe A/B. En réalité, Bruno semblait lancer un défi direct à la classe A, osant presque ses concepteurs à prouver qu’il avait tort. Il avait émis une affirmation audacieuse et générale, qui, on pourrait s’y attendre, serait accueillie par des ripostes de la part des défenseurs de la classe A prenant la parole pour leur cause, n’est-ce pas ?
Criquets.
Dans l'espoir de lancer un dialogue sur la place de la classe A dans le domaine de l'audio, j'ai adressé un courriel à plusieurs concepteurs et fabricants de renom spécialisés dans les amplificateurs de classe A, que vous connaissez probablement (si vous possédez un amplificateur de classe A, il est fort possible qu'ils en soient les créateurs). J'ai commencé par me présenter, puis j'ai demandé si, en tant qu'acteurs de la conception ou de la fabrication d'amplificateurs de classe A, ils souhaitaient répondre aux propos de Bruno, que j'avais inclus dans mon message.
Je leur ai également demandé s'ils souhaitaient partager leur point de vue sur l'évolution future de la technologie de classe A.
Enfin, j'ai demandé : « Si vous pensez que la classe A offre une meilleure qualité sonore que la classe D, pourriez-vous expliquer en quoi cela se manifeste ? »
Je m'attendais à recevoir une poignée de réponses enthousiastes de la part de personnes prêtes à rétablir la vérité ou à vanter les vertus de la classe A, tout comme cela avait été le cas pour les adeptes de la classe D dans mes articles sur le sujet. Mais, encore une fois, le silence radio.
Cela ne signifie pas que les concepteurs ou fabricants de classe A à qui j’ai envoyé des courriels n’ont pas répondu parce qu’ils avaient quelque chose à cacher ou qu’ils partageaient l’avis de Bruno. Ils n’étaient évidemment pas obligés de répondre, et il est tout à fait possible que mes courriels aient été redirigés vers des dossiers de courrier indésirable. Néanmoins, le silence qui a suivi a éveillé en moi une sensation persistante qu’il restait quelque chose de non-dit.
La phrase que Bruno m’a dite et qui est restée gravée dans mon esprit est la suivante : « Un niveau de performance donné est beaucoup plus facile à atteindre en classe A qu’en classe D. Mais les concepteurs d’amplificateurs de classe A se sont, dans l’ensemble, reposés sur leurs lauriers. »
Si c'est le cas, cela pourrait inquiéter les partisans de la classe A. Comme l'a souligné John Stronczer, de Bel Canto, dans mon article La technologie de classe D est-elle à son apogée ? : « La technologie n'est jamais statique, sinon elle meurt ».
La classe A est-elle une technologie dépassée ? Tout ce que je sais avec certitude, c’est le silence assourdissant des fabricants d’amplificateurs de classe A après que Bruno a lancé son défi : le bruit des criquets.
J'aimerais entendre ces fabricants qui ont choisi de travailler avec la classe A plutôt qu'avec les autres classes, pour une raison ou une autre, afin de contribuer à rétablir la vérité et poursuivre cette discussion.
ADDENDUM :
Un jour avant la publication de cet article, j'ai eu le plaisir de recevoir une réponse de l'un des concepteurs de classe A à qui j'avais envoyé ce premier courriel : Nelson Pass, de Pass Labs et First Watt. J'espère que cela augure d'autres réponses à venir :
Bonjour Robert,
Mon partenaire commercial de longue date, Joe Sammut, avait l'habitude de dire : « C'est du divertissement, pas de la dialyse. » L'industrie audio regorge de goûts variés, et en concevant des produits qui nous plaisent à nous-mêmes, nous constatons qu'un pourcentage de la population audiophile adopte notre équipement et en est pleinement satisfait.
Je respecte les efforts de Bruno pour améliorer la technologie de la classe D. Je l’ai explorée il y a des années, et Gordon Holt (fondateur de Stereophile) m’en a fait un retour positif. Mais, en fin de compte, elle ne m’a pas convaincu, et j’ai donc choisi de continuer à développer des circuits simples en classe A.
Mais j'ai une photo pour vous....
best, np
Image d'en-tête avec l'aimable autorisation d'Eugene Zh.
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